Procès des espions du Service de renseignements allemand (SRA) de Dijon

Un procès où comparaîtront des espions et des assassins s’ouvrait en juillet 1946 à Dijon.
Celui du service de renseignements allemand dans lequel soixante-dix personnes sont inculpées. Quarante-quatre seulement seront présentes à l’audience.

Dijon, 29 juin. – Depuis plus d’un an était menée à Dijon une instruction qui, à différentes reprises, avait attiré l’attention par le nombre ou la qualité des témoins entendus. M. Frenay, ancien ministre, le général Weygand n’avaient-ils pas été, tour à tour, convoqués par le magistrat instructeur ?

De quoi s’agissait-il ? D’un procès qui s’ouvre lundi et qui met en cause l’un des rouages essentiels de la machine militaire et policière allemande, l’Abwehrstelle, plus généralement connue sous le nom de service de renseignements allemand (S.R.A.). En fait une organisation chargée de recruter des espions, des agents de l’ennemi, des assassins.

Dijon fut pendant la guerre le centre d’une des principales subdivisions du service. De la capitale bourguignonne le réseau s’étendait sur plus de dix départements ; il s’élargissait jusqu’à la zone sud, notamment Lyon, Grenoble, Marseille. C’est pourquoi l’affaire instruite par M. Bouchard a revêtu une telle ampleur.

Comment fonctionnait le S.R.A.

Le chef de l’Abwehrstelle était, à Dijon, le colonel Ehinger. Mais ce personnage ne semble avoir tenu qu’un rôle effacé. C’est au major Gleichauf, récemment arrêté en Allemagne, qu’en incombait la direction effective. Sous ses ordres, le lieutenant Kaiser dirigeait et coordonnait le travail des espions ; le docteur Sandrin avait la haute main sur une filiale du service : le  » groupe d’action et de justice sociale « , qui, primitivement chargé de contrôler le départ d’ouvriers français en Allemagne, devint bientôt le  » groupe antiterroriste  » et commit de nombreux assassinats.

Sous le couvert d’un quelconque service administratif, le S.R.A. occupait à Dijon une maison bourgeoise du boulevard Carnot ; auparavant il s’était installé dans la propre maison du général Giraud.

Dès avant la guerre les Allemands s’était d’ailleurs occupée de mettre en place un réseau de renseignements. Un certain Parmenti, dit Mercier, avait recruté, par le truchement de petites annonces, des Français qui acceptaient de se mettre au service de l’Allemagne et qui devinrent par la suite des agents du S.R.A.
(Extrait de l’article du Monde publié le 1er juillet 1946)

Jean-Paul Lien dit Paul, alias Alexandre, alias Flandrin, né le 16 septembre 1912 à Saint-Louis (Haut-Rhin) et mort le 30 octobre 1946 à Sennecey-lès-Dijon, est un agent de pénétration de la Geheime Feldpolizei qui dépendait de l’Abwehr. Responsable de la mort d’un grand nombre de résistants français, notamment du réseau Alliance, il est reconnu après la guerre, condamné à mort et exécuté.

Lien est recruté début 1943 par l’un des membres du réseau Alliance, Alsacien comme lui : Jean-Philippe Sneyers. Lié directement à l’Intelligence Service britannique, le réseau Alliance est du plus grand intérêt pour les forces d’occupation allemandes et devient une priorité aux yeux de l’Oberleutnant Kurt Merk et de son supérieur, le colonel Otto Ehinger. Pour cette mission d’infiltration, l’Abwehr le place sous les ordres du BdS Sturmbannführer Hans Kieffer. Son nom de code dans le réseau est « Flandrin ».

Sous l’autorité de Sneyers, dit « Escrogriffe », Lien intègre le groupe des « Apaches », chargé des coups durs et de la sécurité des opérations. À ce poste, il aide à la capture du PC Sécurité de Lyon et d’une partie du courrier à la fin du printemps 1943, mais les circonstances éveillent les soupçons de Marie-Madeleine Fourcade, chef du réseau, qui tient désormais Lien à l’écart de son état-major. Toutefois celui-ci a capté la confiance de ses chefs directs, Sneyers et Édouard Kauffmann, chef des Apaches ; il n’est pas mis à l’écart, et continue de rassembler les renseignements concernant le fonctionnement du réseau.

Fourcade part pour Londres en juillet, et son successeur à la tête du réseau, Léon Faye (« Aigle »), la rejoint en août. Lien prépare alors la capture de ce dernier, censé revenir en France en septembre. Le 16 septembre 1943, Faye est de retour de Londres. Un Westland Lysander anglais le dépose à 45 km de Paris (Bouillancy, près de Nanteuil-le-Haudouin), en compagnie du radio anglais Ferdinand Rodriguez (« Pie »), d’une estafette et de quatre opérateurs radio. Le responsable des transports aériens, Pierre Dallas, les reçoit accompagné de Sneyers et de Lien ; il est décidé, malgré les règles de sécurité, de réunir tout le monde dans un seul wagon du premier train du matin pour filer vers Paris, gare du Nord. Mais en gare d’Aulnay-sous-Bois, les agents allemand et la Milice interviennent brusquement. L’Oberleutnant Merk en personne monte dans le wagon et s’installe dans le compartiment voyageur en face du résistant français et le questionne : « Avez-vous fait bon voyage en Angleterre, Monsieur Faye ? ». Le coup de filet est brutal et efficace. Dans le même temps, les différents PC de Paris reçoivent également la visite de la Gestapo ; si l’état-major peut s’échapper, les radios, les « Apaches » et certains agents du PC renseignements sont pris. Le 21 septembre, c’est en province que les arrestations commencent : les régions Bretagne, Est, Centre, sont ravagés grâce au travail de Lien mais également d’autres collaborateurs.

Libéré en catimini face aux doutes des survivants du réseau Alliance, Jean-Paul Lien s’éloigne d’Alliance mais sa couverture n’est pas totalement percée à jour : malgré les convictions de Fourcade, le nouveau chef Paul Bernard ne croit pas que cette vague d’arrestation soit due à une trahison mais plutôt à des erreurs de sécurité lors de la réception de Faye.

À la Libération, il se retrouve à la tête d’un groupe de résistants. En qualité de capitaine de FFI, il conduit des combats contre les Allemands battant en retraite, avant d’incorporer la 1re armée française du général de Lattre de Tassigny, dans les Vosges.

C’est en tentant de prendre contact avec la sécurité militaire française de Paris qu’il est reconnu par Ferdinand Rodriguez, le fameux Pie du réseau Alliance. Rodriguez, d’origine britannique, est pris pour un agent important par les services secrets allemands, sous le pseudonyme d’Edward Rodney. Il est donc conservé comme otage après son arrestation du 16 septembre 1943, puis libéré lors d’échange avec un agent allemand, entre services secrets. L’officier radio toujours au sein de l’Intelligence Service identifie Lien alors qu’il parade en uniforme de capitaine de l’armée française dans un bar des Champs-Élysées. Arrêté, Lien s’évade. C’est un autre rescapé du réseau Alliance, Jean Roger, dit Sainteny, qui le retrouve.

Incarcéré au fort de Charenton, il est jugé par la cour de justice de Dijon, avec 20 agents français du poste de l’Abwehr de Dijon, le 20 juillet 1946. Condamné à mort, il est fusillé le 30 octobre au fort de Sennecey-lès-Dijon.

Contenu soumis à la licence CC-BY-SA 3.0 (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0/deed.fr) Source : Article Jean-Paul Lien de Wikipédia en français (https://fr.wikipedia.org/wiki/Jean-Paul_Lien).

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