Le réseau est conçu à Pau et Oloron par le Palois Georges Loustaunau-Lacau, en juin-octobre 1940.
Les conditions de sa création sont les suivantes. Le 7 octobre 1940, un petit groupe de militaires, les uns d’active, les autres de réserve, tous anciens combattants de la Grande Guerre, tous anciens élèves du lycée de Pau, décide de se constituer un noyau de résistance, à l’initiative de l’un d’eux, le commandant Georges Loustaunau-Lacau. Ce dernier s’était déjà signalé dès juin 1940 par son refus de l’armistice et sa volonté de continuer le combat. Le petit groupe se retrouve quelques semaines plus tard, le 28 octobre, date véritable de la création du réseau. La réunion a lieu en toute discrétion chez le négociant en vins palois Henri Saüt, dans l’arrière-boutique de son magasin, rue Castetnau. Elle rassemble notamment, outre Loustaunau-Lacau et Saüt, quatre autres officiers, Pierre Gascogne, Jean Broqua, Camille Bouvet et le capitaine Dupuy. Ces officiers partagent, au-delà de leurs souvenirs communs de lycéens et de combattants, une même conception de la grandeur de la France. Ils ne supportent pas l’idée de la défaite, dont ils estiment qu’elle est contraire à l’histoire du pays et infamante pour son prestige. Ils appartiennent à la même tendance politique, celle de la droite nationaliste, socialement conservatrice mais viscéralement patriote. Certains d’entre eux, comme Loustaunau-Lacau, ont même été en contacts avec la Cagoule, avant la guerre, et n’ont jamais caché ni leur anticommunisme, ni leurs sympathies pour la droite extrême.
Loustaunau-Lacau est en 1924 condisciple de de Gaulle à l’Ecole de Guerre. Il sort major de sa promotion. Il dirige en 1937 le périodique L’Ordre national, journal d’extrême-droite, et, à ce titre, est placé dès 1938 en position de non-activité par le gouvernement Daladier. Personnage d’un charisme indiscutable, il est l’âme du petit groupe clandestin. Sous le pseudo de Navarre, il lui confère sa première identité, le réseau Croisade, très vite rebaptisé Alliance.
Il convient de souligner qu’aucun des créateurs du réseau ne songe, à l’automne 1940, à remettre en cause la légitimité du nouveau régime fondé par Pétain. Tous sont alors maréchalistes et l’affirment sans ambages. Mieux, Henri Saüt lui-même est le président de la section départementale de la Légion Française des Combattants (cette couverture lui permettra, dès 1941, d’accumuler d’innombrables informations et de les transmettre à Londres). Par la suite, évidemment, ils s’opposeront tous frontalement à Vichy. Leur engagement dans la Résistance les conduira même à en payer le prix le plus fort, à la seule exception de Loustaunau-Lacau.
En 1941, la ville de Pau peut être considérée comme le véritable siège du comité directeur d’Alliance, puisque la plupart des réunions se tiennent dans deux villas (aujourd’hui disparues) du boulevard d’Alsace-Lorraine, la villa Etchebaster d’abord, la villa Welcome ensuite. La villa Etchebaster, premier véritable siège d’Alliance, fut louée par Pierre Gascogne, à son propre nom, en mai 1941.
Le réseau fonctionne pendant toute l’époque de Vichy. Fin 1941, Loustaunau-Lacau en confie le commandement à une femme d’exception, Marie-Madeleine Fourcade. Elle parviendra à échapper à toutes les poursuites et restera à la tête de l’organisation pendant plus de trois ans.
Alliance transmet au SOE d’innombrables renseignements sur les mouvements des troupes allemandes, leurs effectifs, leur localisation, les fortifications défensives de la côte atlantique, notamment la position des batteries côtières aménagées entre Hendaye et Tarnos.
Le réseau est salué par de Gaulle comme « l’un des premiers et des plus importants services de renseignements sous l’Occupation. »
Il a compté au total 3 000 membres (nombreuses sections régionales). Parmi eux, Jean Sainteny, Louis Jacquinot, etc.
Un millier d’arrestations environ.
438 morts déportés, torturés ou fusillés.
Membres fondateurs du réseau
– Camille BOUVET, notaire à Dax, fusillé à Paris le 30 novembre 1942
– Jean BROQUA, mort en déportation à Burschal, en mai 1944
– le capitaine DUPUY, arrêté et fusillé à Paris en 1944
– Pierre GASCOGNE, arrêté, fusillé à Fresnes le 17 juillet 1944
– Georges LOUSTAUNAU-LACAU
– Henri SAÜT, négociant palois, sa fonction de chef départemental de la LFC est une couverture qui lui permet de travailler pour la Résistance ; déporté à Dachau, il est ensuite envoyé au camp de travail d’Allach et muté au camp d’Hersbrück, où il meurt dans les conditions héroïques.
Texte publié le 27 avril 2020 par Claude Laharie sur https://www.bpsgm.fr/reseaux-renseignements-basses-pyrenees-alliance/