Le choix de l’Angleterre

Devant les propositions de rejoindre Londres, Loustaunau-Lacau préfère Vichy pour mettre en place le réseau : « Il va falloir nous débrouiller entre nous et montrer de quoi nous sommes capables pour que le secours vienne de l’extérieur. » Son but est d’aller directement à la source pour se renseigner, et prendre des contacts extérieurs pour agir. Vichy est devenue le siège des ambassades en France. Ce premier groupe reçoit le nom de « Croisade ».

Loustaunau-Lacau propose aux autorités de Vichy la création d’un centre d’accueil pour les démobilisés, les évadés et autres réfugiés ou anciens combattants. Il loue l’hôtel des Sports et, son projet accepté par Pétain, met en place son équipe. Dans le même temps et à sa demande, il est nommé délégué général de la Légion française des combattants, dans laquelle il espère trouver les meilleurs éléments pour ses projets. Il compte également grâce à cette fonction pouvoir atteindre sans souci la zone occupée, dans laquelle il n’a pour le moment aucun contact, et demande à Marie-Madeleine de mettre au point le futur réseau.

L’hôtel accueille les réfugiés pendant la journée et permet l’organisation de rencontres clandestines pendant la nuit, par le biais de ses chambres inoccupées. Ces échanges sont facilités par la nécessité pour l’armée française de recréer de toutes pièces ses services de renseignements, les archives du 2e bureau ayant été capturées durant la débâcle. Loustaunau-Lacau fait le bilan de ces premiers contacts : deux filières pour transmettre les renseignements aux Britanniques s’offrent au réseau. La première est représentée par Fourcaud dont il assure le retour sur Londres via la complicité du colonel Baril, du SR-Armée. L’autre est représentée par Pierre Dupuy, diplomate canadien envoyé pour tâter le terrain vichyssois. Il envoie également à Londres comme ambassadeur personnel Jacques Bridou, le frère de Marie-Madeleine, bilingue et récemment marié à une Anglaise. Le but de Loustaunau-Lacau, en établissant ces contacts avec Londres, est double : tout d’abord informer les Britanniques de la création du réseau, et en même temps assurer de Gaulle de sa coopération pour la poursuite des combats. Toutefois, il pense qu’au préalable un commandement clandestin en France est nécessaire, pour prendre les décisions sur le terrain ; de plus, il compte informer directement les services britanniques, tout en souhaitant recevoir ses moyens d’actions via les services gaullistes. Un manifeste, intitulé « La Croisade », est écrit et communiqué aux Anglais. Les premiers renseignements à passer sont confiés à Fourcaud, avec notamment toutes les précisions concernant les camps d’aviation allemands près de la ligne de démarcation.

Photo du faux passeport de Kenneth Cohen au nom de Keith Crane, lorsqu’il a rencontré Loustaunau-Lacau à Lisbonne. La même photo a été utilisée pour son laissez-passer au QG FFL. © the estate of Kenneth Cohen

Loustaunau-Lacau embarque pour Lisbonne, où il rencontre le Commandant de la Royal Navy Kenneth Cohen, du MI6 qui est l’assistant de Claude Dansey, alors vice-directeur du MI6. Cohen a également participé au debriefing de Jacques Bridou lors de son premier passage à Londres. Loustaunau-Lacau a pu, grâce à d’anciennes connaissances de l’école de guerre (notamment le général Ungria, ancien chef de la Seguridad espagnole, et le colonel Lelo Portela, frère du chef du 2e bureau portugais), arriver sans encombre au rendez-vous. Leur entretien dure trois jours, aux alentours du 14 avril 1941. Si « Crane » (fausse identité de Cohen) souhaite que le réseau s’occupe avant tout de renseignements, Loustaunau-Lacau obtient que les services britanniques avancent les sommes nécessaires au développement du réseau, tout en expliquant que son but est de favoriser le passage à l’action directe le moment venu. L’argent ainsi prêté serait remboursé par le gouvernement français à la fin de la guerre. Loustaunau-Lacau explique également qu’il continuera à aider les envoyés de De Gaulle, et qu’il le tiendra au courant des activités du réseau, par l’intermédiaire de Fourcaud. Kenneth Cohen accepte ces requêtes, à condition que les Britanniques soient toujours les premiers informés des renseignements obtenus.

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