René Leseigneur – Secteur Ferme

René Leseigneur, né à Cherbourg le 7 Juillet 1914, mort à Saint-Lô le 6 juin 1944 est un résistant de la Manche.

Agent technique à l’arsenal de Cherbourg vivant au village de La Loge à La Glacerie, Georges THOMINE (Cachalot), pêcheur à Port-en-Bessin (Calvados), rend visite à son cousin René LESEIGNEUR, habitant La Glacerie, qui travaille à l’Arsenal de Cherbourg, et l’engage. Il sera l’un des meilleurs agents du réseau dont les renseignements, d’une précision remarquable, seront communiqués régulièrement à son cousin. Il fait entrer dans le réseau André Marcel LEBOULLENGER, qu’il savait être un spécialiste de radio.
Bien que nouvellement implanté. le réseau  » Alliance  » du Cotentin est, en fin 1942, capable de fournir à l’organisation centrale des observateurs sérieux et compétents.

A Cherbourg, René LESEIGNEUR a fait connaissance avec André CONARD, préparateur en pharmacie, qui adhère avec enthousiasme au réseau, puis, par celui-ci, avec le Docteur Jack MESLIN (Le Vairon). médecin du  » Soldattenheim « , le dispensaire allemand. Ces fonctions et sa parfaite connaissance de la langue allemande lui permettent d’obtenir des informations d’ordre militaire au cours de conversations amicales avec le commandant WITZEL, Kreiskommandant, sur :
– les fortifications établies dans la Hague et sur les côtes nord et est du Cotentin ;
– les pistes d’envol en construction dans la presqu’île pour le lancement des missiles V. 1 et V. 2.

Il s’adonne, en outre, au sabotage du recrutement de jeunes gens pour le S.T.O. par :
– la délivrance de certificats médicaux attestant l’inaptitude au travail ;
– l’injection, en accord avec CONARD, avant leur comparution devant la commission compétente, d’un médicament provoquant un malaise passager, permettant leur exemption. Beaucoup de ces requis deviendront des réfractaires ou des résistants.

Plusieurs membres du réseau sont arrêtés le 17 mars 1944 : le docker Eugène CAUVIN (Léonard) qui renseignait le réseau de Port-en-Bessin. sur les mouvements des vedettes allemandes de Cherbourg. Roger LAULIER, Jack MESLIN, Alphonse LANGE, André LEBOULLENGER, René LESEIGNEUR, à Brix, Raymond HAUGMARD à Carentan, le docteur PHILIPPE à Saint-Lô. Le lendemain 18 mars, le sous-préfet de Cherbourg, Lionel AUDIGIER, et le 30 mars, André CONARD à Agon. Transférés à la prison de Saint-Lô, LAULIER, MESLIN, AUDIGIER, LESEIGNEUR périront sous le bombardement de la nuit du 6 au 7 juin 1944.

Dans  » Les Mains jointes « , Rémy évoque le calvaire des Résistants enfermés dans la prison-tombeau. Les pages 169 et 170 concernent les Résistants dont nous avons parlé :

 » Après l’alerte de 22 h, Franck s’était endormi tranquillement. Le réveil, au milieu de la nuit fut brutal.  » Les murs de la prison, épais de plus d’un mètre et demi, tremblent sur leurs bases. A travers les explosions, on entend le ronronnement incessant d’une nuée d’avions de bombardement qui planent au-dessus de la ville. Des débris passent à travers les planches qui bouchent la fenêtre. Franck regarde : la ville brûle ; mais la vieille prison semble tenir. Par un trou de souris, il communique avec la cellule d’en dessous… ils sont à six.
Cuny et ses camarades ont pris la décision de sortir de cette cellule où ils risquent d’être écrasés. La porte est épaisse, énorme. Avec des pieds de châlit, ils tentent de la forcer. Elle craque, fendille ; mais ne bouge pas. Les pieds cas-sent les uns après les autres. Les prisonniers y mettent le feu avec des allumettes qu’ils avaient réussi à dissimuler après avoir enflammé leurs paillasses. Au bout de quatre heures d’efforts, le verrou du haut cède. La prison n’est plus qu’un brasier… Les bombes explosent encore, à raison d’une toutes les cinq minutes.
 » Cuny se précipite avec son fils et son camarade Jean Vauzelle jusqu’à la cellule n° 7 qui est au 1er étage, et renferme le lieutenant Franck, ainsi qu’un gendarme de Valognes : Le Coadou. La porte de la cellule tient bon. Cuny se souvient qu’il a été employé à travailler clans le jardin ; il sait où trouver une pioche ; il court et libère les deux prisonniers. Il faut partir…
 Mais des plaintes, des appels viennent de l’autre côté de la prison. Cuny et son fils y courent, Franck et Le Coadou sont séparés d’eux : la voûte centrale vient de s’effondrer dans un fracas épouvantable. Cuny voit des cadavres partout. Il entend des cris : quelques prisonniers sont encore vivants, ensevelis jusqu’aux épaules, incapables de se dégager. « 

La suite du récit est inexacte ; Cuny ne délivre pas le Dr Philippe, ni Leseigneur, qui, hélas est déjà mort. Rémy – qui a beaucoup écrit – s’est-il documenté sérieusement ? Cuny et son fils l’ont-ils induit en erreur ? Il n’est pas aisé d’en décider.
Mais à partir de ce récit inexact, l’historien Marie Granet écrira que le bombardement  » permit à plusieurs internés de s’échapper  » ; et elle cite le sous-préfet de Cherbourg Audigier et Leseigneur, parmi les rescapés.

Pour parler d’Audigier ou de Leseigneur, nous avons essayé de retrouver deux survivants de la cellule 5 (1er étage) :
– Le D’ Philippe, ancien médecin saint-lois, réside à Caen ; il est très âgé mais une cassette permet de l’entendre ;
– Alphonse Lange, président de l’A.D.I.F., nous a fourni le plan de la cellule (12 morts, 4 rescapés, dont deux seuls restent vivants). Il nous dit :

La prison s’écroula dans un fracas épouvantable, lentement, comme une boîte qu’on fracasse en mettant le pied dessus. Nous avons pensé que c’était fini, que nous allions mourir là. Tout le monde hurlait. Le sous-préfet avait les jambes pratiquement coupées par la chute d’une poutre métallique. Il appelait à son secours le D’ Philippe qui, de son côté, criait :  » Dégagez Lange. Leseigneur va mourir.  » René Leseigneur était gravement touché, mais aucun secours n’était possible… Sous les pierres et les poutres, les lits métalliques se sont écrasés, refermés, emprisonnant ceux qui étaient à l’intérieur.
Bien des camarades sont morts, broyés à cause de ces lits… J’avais été blessé à la tête par l’armature du lit supérieur ; j’avais perdu mes lunettes. Comme je criais, le D’ Philippe a cru que j’étais en train d’agoniser…
Il y a eu une accalmie ; une bombe à retardement m’a miraculeusement remis à l’air libre et dégagé. Le D’ Philippe put s’évader dans le courant de la journée. J’ai erré pendant quinze jours dans le  » no man’s land « , avant de rencontrer les Américains, le 23 juin. « 

C’est la fin, pour le département de la Manche, d’un des plus prestigieux réseaux de renseignements de la France occupée.

SOURCES : https://www.wikimanche.fr/Ren%C3%A9_Leseigneur- http://beaucoudray.free.fr/1940.htm – Mémorial Alliance

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